Après un petit déjeuner pris en famille à l’hôtel - ce qui
en soit est un exploit - , nous quittons l’hôtel El Rancho. Pas question de
traîner au Nouveau-Mexique : l’Arizona nous attend plus loin sur la route,
avec ses merveilles et un reportage photo exceptionnel en perspective pour
Annette.
Problème : pour rejoindre la prochaine ville sur la 66
(Lupton), nous devons trouver l’ancien tronçon. Mais rien n’indique son
emplacement ni sa direction. La carte du Guide du Petit Futé est bien trop
simplifiée, les indications que nous avons, relevées sur un site internet dédié
à la mother road avant de partir de France, sont totalement confuses.
Pierre a roulé, sûr de lui, depuis l’hôtel, cheminant au fil des boutiques d’antiquités, et je n’ai pas fait attention au trajet. On se retrouve donc à la sortie ouest de la ville, totalement perdus, au milieu de nulle part, avec l’autoroute plus ou moins sur notre gauche, filant droit devant, une route qui s’éloigne vers un paysage aride et désertique sur notre droite au nord, une autre qui va en direction du sud, passant sous l’I-40.
Nous faisons demi-tour, revenons sur nos pas, guettons l’écran du GPS qui s’obstine à vouloir nous faire prendre l’autoroute ou nous envoyer au nord (ce qui n’est pas logique d’après nos cartes). Au bout d’une heure, nous décidons au petit bonheur la chance de prendre la route vers le sud, route « sans nom» comme l’indique le GPS, pour finalement rebrousser chemin après avoir rencontré un convoi de mexicains se rendant à un mariage. Ils nous renvoient vers l’I-40. Je suis furax. Il est possible que Pierre ait raté un embranchement, une indication en amont, mais après tout, c’était à moi de veiller à ce qu’il ne se fourvoie pas - ne suis-je pas the copilote ? Mais voilà : j’étais penchée sur mon carnet de notes, à y écrire le récit des précédentes journées pour le blog. Je me maudits, maudits ce blog, ce roman à écrire, et l’attitude atonique de Pierre qui me porte sur les nerfs, je maudits Gallup, la route 66… Je mets une ambiance d’enfer dans la voiture, et Pierre s’y met aussi. Les enfants, indifférents, commencent à s’habituer à nos prises de bec.
Pierre a roulé, sûr de lui, depuis l’hôtel, cheminant au fil des boutiques d’antiquités, et je n’ai pas fait attention au trajet. On se retrouve donc à la sortie ouest de la ville, totalement perdus, au milieu de nulle part, avec l’autoroute plus ou moins sur notre gauche, filant droit devant, une route qui s’éloigne vers un paysage aride et désertique sur notre droite au nord, une autre qui va en direction du sud, passant sous l’I-40.
Nous faisons demi-tour, revenons sur nos pas, guettons l’écran du GPS qui s’obstine à vouloir nous faire prendre l’autoroute ou nous envoyer au nord (ce qui n’est pas logique d’après nos cartes). Au bout d’une heure, nous décidons au petit bonheur la chance de prendre la route vers le sud, route « sans nom» comme l’indique le GPS, pour finalement rebrousser chemin après avoir rencontré un convoi de mexicains se rendant à un mariage. Ils nous renvoient vers l’I-40. Je suis furax. Il est possible que Pierre ait raté un embranchement, une indication en amont, mais après tout, c’était à moi de veiller à ce qu’il ne se fourvoie pas - ne suis-je pas the copilote ? Mais voilà : j’étais penchée sur mon carnet de notes, à y écrire le récit des précédentes journées pour le blog. Je me maudits, maudits ce blog, ce roman à écrire, et l’attitude atonique de Pierre qui me porte sur les nerfs, je maudits Gallup, la route 66… Je mets une ambiance d’enfer dans la voiture, et Pierre s’y met aussi. Les enfants, indifférents, commencent à s’habituer à nos prises de bec.
Si nous avions jeté un œil la
veille sur google map, nous aurions constaté combien il est périlleux de
trouver la 66 en sortant de la ville. Celle-ci passe par tous les
noms : Road 601 ou 602, elle part vers le sud (nous y étions donc !)
avant de bifurquer vers l’ouest, de passer sous l’I-40, pour la longer plus ou
moins jusqu’à Lupton. Nous nous sommes crêpé le chignon pour rien. Fallait
prendre l’autoroute, et basta.
Parfois, la route donne le sentiment de nous jouer des tours, de se moquer de nous, décidée à nous en faire baver sous un soleil de plomb.
Parfois, la route donne le sentiment de nous jouer des tours, de se moquer de nous, décidée à nous en faire baver sous un soleil de plomb.
Nous avons du retard sur l'horaire et roulons sans nous arrêter à
Lupton, puis, nous passons en Arizona sans même y penser.
De Chambers à Holbrook, le guide nous déconseille de tenter
de suivre la route qui disparaît purement et simplement. Nous restons donc sur
l’I-40 mais loupons la sortie pour
Canyon Chelly National Monument, situé au milieu de la réserve Navajo. Nous ne
verrons pas les ruines des villages indiens pueblos (Gaston aurait pourtant
beaucoup aimé), ni les peintures et gravures sur roches. Quoi qu’il en soit, il
faudrait passer-là une journée, prendre un guide Navajo (le terrain est privé)
et débourser pas mal de dollars pour visiter le canyon.
Photo tirée du site internet |
Mais Pierre ne rate pas la sortie de Petrified Forest National Park. Il regroupe deux parcs : Petrified Forest et Painted
Desert. Creusé par l’érosion, le relief révèle des strates aux coloris
incroyables que les indiens ont reproduit en motifs sur leurs vêtements, tipis
et couvertures. Le mieux est d’y aller un jour, de vous jeter sur le site
officiel. Mais voilà déjà un aperçu: quelques photos sublimes de ce désert peint et de ces
arbres pétrifiés par la lave il y a 600 millions d’années. Le ciel est chargé, la chaleur est écrasante, la terre s'ouvre comme une châtaigne trop cuite.
Les entrailles nous racontent la Terre |
Parfois, un nuage ajoute au relief, souligne la beauté du panorama |
On est bien sur la route... |
Vestige des jours anciens - en arrière plan, les fameux poteaux électriques de la 66 |
L'orage menace, la chaleur devient intenable à l'extérieur de la voiture |
Le vent se lève, roules les nuages sous son ventre. Annette tente une sortie, le paysage fascine notre photo reporter |
Ici, ma fille a bien failli s'envoler tellement les rafales de vent étaient violentes |
Au loin, dans le ciel assombri, un arc en ciel ajoute de nouvelles strates à la verticale de la terre |
Petrified Forest |
Des arbres, pétrifiés par la lave. Le lieu est très surveillé: les vols sont nombreux et il n'est pas rare de trouver des pierres dans les trading post aux alentours. |
Pierre jadis incandescente, encore tiède de soleil |
Cette photo d'Annette et de mon point de vue parfaitement composée |
Comme un adieu, deux arc-en-ciel servis sur un plateau. Le ciel étend sa cape couleur d'asphalte, nous reprenons la route |
Notre étape du soir est la ville d’Holbrook, connue pour son
Wigwam Motel - qui a inspiré le Cosy Cône Motel du film d’animation Cars. Mais
nous n’avons pas réussi à avoir un tipi, tout est complet. Je trouve ça
franchement nul de faire la route et de ne pas réussir à dormir dans le motel
le plus connu de la route - et le plus atypique ! (précision: il existe à ma connaissance trois Wigwam Motel, un à Holbrook, un autre à San Bernardino sur la route, et un troisième à Rialto).
Une déception de plus
que je glisse dans mon panier. Bien plus tard, en interrogeant divers blogs de
touristes ayant fait la 66, je réalise qu’il faut s’y prendre des semaines à l’avance
pour réserver, tant le lieu est demandé. Pas de regret, donc, puisque le Best Western juste à côté est super tranquille, pratique et l’accueil tellement
sympathique. Nous allons gaiment nous remettre de notre journée, alors que le
thermomètre affiche encore un bon 34°C.
Photo tirée du site internet |
Nous irons dîner pas loin, dans un resto que vous trouverez
dans le roman Butterfield Stage Co Steak House - celui où le tueur, agacé par un gars qui passe l’aspirateur
devant lui alors qu’il mange son T-Bone, finit par lui régler son compte sur le
parking après l’addition. Pour l’anecdote, c’est à nous
que c’est arrivé : le gars nous a servi, puis, après avoir déposé les
assiettes sur la table, il s’est mis à passer le balai puis l’aspirateur
presque sous nos chaises ! Je lui ai demandé d’arrêter tout de suite. Je
devais avoir l’air menaçant parce qu’il n’a pas insisté et vite remballé son
aspi.
Mais c’était trop tard pour lui : dans ma tête, il était mort.
Pierre m’en parle encore avec le sourire : il paraît que je l’ai impressionné le serveur (une allumette, tenait grâce à son chapeau).
Mais c’était trop tard pour lui : dans ma tête, il était mort.
Pierre m’en parle encore avec le sourire : il paraît que je l’ai impressionné le serveur (une allumette, tenait grâce à son chapeau).
Inventer un personnage de tueur, c’est se donner le droit de commettre
l’irréparable, de laisser libre court à ces pulsions meurtrières. C’est vider toute
cette violence contenue, nourrie d’empêchements, d’humiliations, et
d’injustices.
La déco est très sympa, ça attire le touriste! (photo tirée du site internet) |
Avant de rentrer à l'hôtel, nous allons déguster une glace au Dairy Queen, Navajo Boulevard, une enseigne courue de crème glacée. Le boulevard est désert, et nous sommes les seuls clients. Après Springfield, Shamrock, Gallup, Tucumcari... encore une petite ville américaine dont les rues sont vides la nuit. Figée dans le silence, avec le ronronnement des feux de signalisation et le grésillement des enseignes lumineuses, elle est comme un crépuscule perpétuel, dans une torpeur presque familière. Ici, le lever du jour tient du miracle.
J'ignore encore que le lait est un poison pour moi - je suis intolérante aux laitages depuis des années sans le savoir. Au plaisir de déguster une glace s'associent le désagrément de douleurs au ventre, d'inconfort, des aigreurs d'estomac, et parfois même des sinusites et migraines. A l'époque, je crois, au contraire, que le lait m'aide à "casser" l'acidité du café dont je n'aime pas le goût. Aux USA, le lait est présent partout du breakfast au dîner (les menus enfants sont proposés avec un verre de lait). Je vais donc voyager six semaines dans cet inconfort quasi permanent, et cela ne va rien arranger à mon moral. Avec le recul, ce souci de santé va détruire la beauté de ce voyage, salir ma vision générale, et plus que tout, c'est cela qui me mettra dans un état quasi dépressif à notre arrivée à Las Vegas. Mais encore une fois, cette situation que je vie travaille pour le futur roman : car c'est Lola qui s'installe en moi, Lola qui souffre de migraines, d'inconfort, Lola qui elle aussi, plus tard, comprendra ce qui l'empoisonne. Après ce voyage, je prendrai rendez-vous avec une homéopathe qui m'aidera à repenser et mieux vivre ma façon de m'alimenter.
A 1 heures du matin, nous avons gagné une heure grâce au décalage horaire (spécifique à l’Arizona). Nous en profitons, Annette et moi, pour chercher un hôtel sur internet en prévision de notre séjour prochain à Las Vegas, notre étape dans trois jours. Prix souvent élevés, embarras du choix, on s’écroulera avant d’avoir réservé la moindre chambre.
Demain, Navajo Boulevard s'ébrouera sous la caresse de l'aube, comme un vieux chien après la sieste.
Superbes les photos!! Ça fait rêver.
RépondreSupprimerMerci Stéphanie, il ne tient qu'à vous de transformer ce rêve en réalité ;-) Bien à vous. Sophie
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